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Par Jean-Michel Boudreau |
Le 18 avril 2016, la Cour d’appel renversait, dans l’affaire Lambert (Gestion Peggy) c. Écolait ltée, 2016 QCCA 659, un jugement de l’honorable Micheline Perreault dans lequel elle avait rejeté la demande de la requérante d’exercer une action collective contre Écolait.
Dans son arrêt, la Cour d’appel commence
par réprouver une décision interlocutoire de la Cour supérieure qui avait
ordonné à la requérante de retirer les pièces au soutien de sa requête pour
autorisation. Selon nous, le libellé de l’article 1002 sous l’ancien Code de procédure civile (maintenant 574
C.p.c.) ne portait pas à confusion et
il est étonnant que la Cour supérieure ait refusé ainsi la production de pièces
au soutien de la requête en autorisation, invoquant l’absence d’autorisation
préalable du Tribunal. Comme l’écrit la juge Bélanger pour une Cour d’appel
unanime:
[31] Il est
utile de rappeler qu’une personne qui requiert l’autorisation d’exercer une
action collective peut produire, au soutien de sa requête, les pièces qu’elle
estime appropriées pour satisfaire son fardeau de démonstration, sans avoir à
obtenir la permission pour ce faire.
[32] L’ancien
article 1002 C.p.c., in fine (C-25),
devenu 574 C.p.c. in fine (C-25.01),
n’a jamais eu pour effet d’obliger un requérant à demander la permission pour
déposer des pièces au soutien de sa requête pour autorisation.
Une autre affirmation de la Cour
d’appel, d’un caractère moins évident, mérite aussi d’être soulignée. Nous
savons depuis l’arrêt Vivendi Canada Inc.
c. Dell’Aniello, 2014 CSC 1, que la proportionnalité ne constitue pas un
cinquième critère indépendant à analyser en sus de ceux qui figurent à
l’article 575 C.p.c (auparavant 1003 C.p.c.), mais que ce principe doit
plutôt être pris en compte dans l’appréciation de chacun des quatre critères d’autorisation.
Il reste cependant à mesurer
l’impact concret que pourrait avoir ce principe dans l’évaluation individuelle
des quatre critères. Or, l’arrêt de la Cour d’appel fournit l’exemple d’un tel
impact sur l’analyse du troisième critère. En vertu de ce dernier, l’action
collective n’est justifiée que lorsque « la composition du groupe rend
difficile ou peu pratique l'application des règles sur le mandat d'ester en
justice pour le compte d'autrui ou sur la jonction d'instance » (art. 575 C.p.c.). La Cour d’appel s’exprime ainsi
sur l’analyse de ce critère :
[57] Je fais
miens les propos tenus par Me Yves Lauzon dans Le Grand collectif publié à l’occasion de l’entrée en vigueur du
nouveau Code de procédure civile.
Celui-ci expose que les facteurs habituellement considérés dans l’analyse de
l’article 1003 c) C.p.c., maintenant
le troisième paragraphe de 575 C.p.c.,
sont le nombre estimé de membres, la connaissance par le requérant de leur
identité, de leurs coordonnées et de leur situation géographique. Il suggère
toutefois que d’autres facteurs peuvent être considérés dont l’impact direct et
déterminant sur la possibilité réelle pour les membres d’ester en justice,
l’aspect financier étant un avantage important de l’action collective. Ainsi,
le principe de la proportionnalité et une saine administration de la justice
peuvent aussi militer en faveur de l’utilisation de l’action collective, malgré
un nombre plus restreint de membres, selon les circonstances de l’affaire dont
la valeur des réclamations.
(nous
soulignons)
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