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Par Julien Lussier |
C’est ce qu’a décidé la Cour d’Appel
dans Electrolux Canada Corp. c. AmericanIron & Metal LP. Les faits à la base de l’appel sont simples :
l’appelante, Electrolux Canada Corp., s’est engagée par le biais d’un contrat à
long terme à vendre ses résidus de métal à l’intimée, American Iron & Metal
LP moyennant un prix d’achat. Au terme du procès, le juge de première instance
concluait qu’à la lumière d’une preuve abondante, l’appelante avait commis une
faute en mettant fin unilatéralement à son contrat avec l’intimée.
L’appelante ne conteste pas cette
conclusion du juge de première instance, limitant son appel à l’évaluation des
dommages subis par l’intimée à titre de perte de profits, que le juge de
première instance avait fixés à 1 679 549,43$. La Cour d’appel, en accueillant
en partie le pourvoi, remarque d’abord que la définition de
« profit » appliquée par le juge de première instance, et qui limite
celui-ci à « la différence entre le prix payé et le prix vendu, moins les
coûts d'exploitation de l'entreprise pour cette activité », est erronée en
ce qu’elle fait abstraction des coûts d’opération généraux de
l’appelante.
Ensuite, et plus fondamentalement, la Cour d’appel souligne les importantes lacunes dans la preuve
présentée par l’intimée au soutien de sa réclamation pour perte de profits,
voyant dans la décision du juge de première instance d’arbitrer, néanmoins, les
dommages une erreur manifeste et dominante justifiant son intervention. Celle-ci
déclare:
[18] I
consider the absence of the proof of Respondent’s overall costs enumerated
above to be fatal to the proof of loss of profit. Respondent had the burden of
proof of such loss. The judge’s error in this regard as palpable and
overriding, and given the absence of evidence, we cannot substitute our
judgement for that of the trial judge by calculating a gross margin and
applying it to the anticipated loss revenue as calculated by the judge to
arrive at a figure of lost profit.
[…]
[21] The
task of assessing damages is largely factual and a great degree of difference
is due to the trial judge in the exercise of his discretion in weighing the
evidence. However, such difference does not extend to adjudication in the
absence of evidence or to speculation on what that evidence may be in order to
fill a gap when the very data that is missing is withheld by the party bearing
the burden of proof. This constitutes a manifest error which, given the impact
on quantum in this case, is overriding. While it is recognised that a judge has
discretion to “arbitrate damages”, this involves an exercise of evaluating
proof and choosing between contradictory evidence or determining quantum. It
includes neither the power to decide in the absence of evidence that exists but
was not produced, nor the power to assume what the evidence might have been had
the proof been made, as the judge did in this case.
Puis, rappelant les principes
énoncés par la Cour suprême dans l’arrêt Banque
de Montréal c. Kuet Leong Ng, à
l’effet que nul ne saurait tirer profit de ses gestes fautifs, la Cour d’appel fait
droit néanmoins à la position subsidiaire de l’intimée sur sa perte de profits,
chiffrée cette fois à 110 795$. Elle s’appuie pour ce faire sur sa propre
décision dans l’affaire Uni-Sélect Inc. c. Acktion Corp., où, dans un contexte de clause de non-concurrence, elle avait fait
correspondre les dommages subis par le bénéficiaire de la clause au profit
dérivé par le cocontractant du fait de sa violation de celle-ci.