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Par Sophie Perron |
Le jugement sur une requête de type Wellington
introduite dans une instance séparée met fin à l’instance et est appelable de
plein droit. Dans la décision Intact,
compagnie d’assurance c. Lamontagne (2016 QCCA 1628) rendue le 5 octobre
dernier, l’honorable juge Manon Savard j.c.a. en arrive à cette conclusion,
alors que les procureurs tant de de la requérante que des intimés plaidaient
qu’une permission d’appel était requise.
La Cour d’’appel devait se prononcer sur une
requête pour permission d’en appeler. L’analyse de l’honorable juge Savard,
j.c.a., répond aux deux questions suivantes :
(1) est-ce l’article 30 C.p.c. (jugement qui
met fin à l’instance) ou l’article 31 (jugement rendu en cours d’instance) qui
s’applique?
(2) puisque le droit d’appel est régi par
l’article 30, l’appel est-il de plein droit (premier alinéa) ou sur permission
(deuxième alinéa)?
Sur la première question, elle conclut que le
jugement de première instance met fin à l’instance et que l’article 30 C.p.c.
trouve application. L’honorable juge Savard, j.c.a., écrit :
[10] Aux fins de déterminer le
processus d’appel applicable, l’ancien Code
de procédure civile opposait les notions de « jugement final/final
judgment » (art. 26 a.C.p.c.)
et de «jugement interlocutoire/interlocutory judgment »
(art. 29 a.C.p.c.). Cette
terminologie n’est pas reprise dans le Code
de procédure civile, le législateur référant dorénavant à des jugements
« qui mettent fin à une instance/that terminate a proceeding »
(art. 30 C.p.c.) et aux
jugements « rendu[s] en cours d’instance/rendered in the course of a
proceeding » (art. 31 C.p.c.).
[11] Dans ses commentaires, la ministre de la
Justice indique que ce changement de terminologie n’a pour but que de corriger
un anglicisme5. Les auteurs André Rochon
et Juliette Vani sont d’avis que la jurisprudence élaborée sur la notion de
« jugement final/final judgment » sous l’a.C.p.c. devrait continuer de s’appliquer à un jugement « qui
[met] fin à une instance/ that terminate[s] a proceeding ». Ils écrivent :
On
ne parle plus de jugements « finals », mais de « jugements qui mettent fin à
une instance ». En plus de corriger un anglicisme, cette modification codifie
la jurisprudence puisqu’un jugement final a toujours été un jugement qui met
fin à l’instance entre des parties et dessaisit le tribunal de la cause
d’action (Société canadienne du cancer c.
Imperial Tobacco ltée, EYB 1989-64888, [1989] R.J.Q. 820, J.E. 89-628
(C.A.)).
[12] Je partage leur avis.
[13] Or, en l’occurrence, le jugement de première
instance dispose du débat soulevé par l’instance et met fin à celle-ci6.
La Cour supérieure en est dessaisie. Bien que le litige entre les parties, dans
son sens large, ne soit pas terminé, ce jugement règle définitivement la
requête des intimés quant à l’obligation de défendre de la requérante et du
courtier, seules questions en litige dans cette instance. Il statue sur la
demande soulevée et « […] met fin au traitement du dossier »7
par la Cour supérieure, qui voit sa juridiction épuisée. [Références omises.]
Sur la seconde question, l’honorable juge
Savard, j.c.a., conclut que le jugement de première instance est appelable de
plein droit en conformité au premier alinéa de l’article 30 C.p.c. Elle
écrit :
[21] […] Règle générale, un jugement qui ordonne à
une partie d’accomplir un acte déterminé est sujet à un appel de plein droit13. Or, en l’occurrence, l’objet en litige est le fait pour la
requérante de devoir défendre les intimés et non de les indemniser des sommes
qu’ils pourraient être obligés de verser à leurs voisins au terme des
poursuites judiciaires intentées ultérieurement au jugement de première instance.
Le montant en litige de ce jugement déclaratoire ne peut donc être quantifié,
de sorte que la règle énoncée au premier alinéa trouve application. [Référence
omises.]
Ainsi, la requête de type Wellington instituée
dans une instance distincte du recours principal est appelable de plein droit.
L’arrêt de la Cour d’appel ne traite pas du sort réservé à la requête de type
Wellington présentée comme moyen interlocutoire dans le cadre d’une instance
déjà mue entre des parties après l’entrée en vigueur du nouveau Code de
procédure civile.
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